OSM/Karina Gauvin éclipse l'autre
Journal La Presse du jeudi 21 décembre 2006 page A34

Sujet: Le talent brute / la brute discrimination


Karina Gauvin et Renée Fleming

On peut y lire :

On passait, en 24 heures, du rouge Fleming au rose Gauvin. Rapprochement inévitable, on l'admettra. Le Noël de Renée Fleming et l'OSM ayant fait salle comble mardi soir à Wilfrid-Pelletier (3000 personnes), la direction dut reprendre le concert, avec quelques variantes et une autre chanteuse, Karina Gauvin, hier soir à la basilique Notre-Dame où, là encore, c'était complet, ou presque (plus de 2500 personnes).

Le rapprochement est d'abord d'ordre visuel : a) les deux robes (et celle de Mme Gauvin particulièrement théâtrale); b) la tenue en scène, l'Américaine affichant presque continuellement le même sourire affecté, alors que la Montréalaise ne sourit qu'entre les pièces et se concentre, dans celles-ci, sur le texte et la musique.

Mais comme Mme Gauvin reprend plusieurs des pièces chantées par l'autre, c'est surtout au plan vocal que s'établit le parallèle. On l'avait prédit et c'est arrivé : Karina Gauvin a gagné sur toute la ligne et a renvoyé l'autre à l'école. En comparaison, sa voix hier soir était plus timbrée, plus claire, plus égale, plus juste, plus virtuose (exemple : les mélismes dans Mozart et Handel), sa diction était meilleure et, surtout, son engagement musical était autrement plus convaincant. Même qu'elle a un peu chargé dans l'Ave Maria de Schubert.

Le cas Fleming-Gauvin ne fait qu'illustrer le malaise qui perturbe le monde du classique. Fleming, médiocrité musicale mais produit médiatique de fort calibre, commande des cachets qui sont quatre ou cinq fois ceux de Karina Gauvin qui, elle, est quatre ou cinq fois supérieure comme artiste.

La formation chorale, nouvelle hier soir, était dominée par des voix de femmes et d'enfants justes et aériennes. On leur a malheureusement fait chanter bien des choses insignifiantes. Au départ, ce programme hétéroclite de pièces courtes ou très courtes créait l'impression d'une soirée beaucoup plus longue qu'elle ne le fut en réalité
.

Mon commentaire

Voilà un bel exemple de la discrimination que subissent les femmes dans le domaine artistique. On ne pouvait demander mieux pour démontrer qu'ils choisissent vraiment le look de la femme artiste avant son talent. Le talent d'une femme, c'est vraiment secondaire pour les producteurs de spectacles, de cinéma, de télévision et de musique.

Les femmes sont vraiment prises que pour des accessoires par eux. Elles font parti du décor tout simplement. Il faut qu'une femme, sur une scène, ça paraisse bien. L'exigence de l'allure mince sous-entend qu'ils considèrent les femmes comme une sous-classe d'êtres humains. Puis, les femmes qui veulent faire carrière dans le domaine artistique doivent se soumettent à leurs exigences.

Cependant, pour plaire aux producteurs, avoir du talent, ne semble pas être une exigence. Miser seulement sur l'allure est une insulte, à l'intelligence et à l'honneur de la gente féminine. Les femmes ne vivent pas par procuration. Les femmes sont des êtres humains à part entière et, non un produit que l'on marchande. L'exigence de la minceur ressemble une forme d'esclavage. 

Quand une femme a un réel talent, c'est elle seule qui peut marchander son talent. Le talent exige le respect. C'est la personne qui a du talent qui a le droit à ses exigences. La compétence ou le talent s'impose par lui-même. Une personne qui a une compétence devient un leader dans son domaine. Les personnes qui reconnaissent la compétence d'une autre personne accepteront d'être influencées par son leadership. Ils vont le suivre volontairement. On ne sent pas soumis face à un leader. 

Les patrons du monde artistique et médiatique ne font pas acte de leadership en exigeant la minceur. Pour la toute simple raison que cela ne correspond à un besoin de la population et que cela fait du tort aux femmes. Un acte de leadership répond toujours à un besoin des gens, c'est toujours positif et pour le bien de la population. 

Les producteurs, les réalisateurs et les metteurs en scène nous imposent donc leur vision de la beauté féminine. Nous n'avons pas le choix de se soumettre à ce qu'ils nous offrent. Ils sont des dominateurs et agissent comme tel. Puis à part de cela, engager une personne avec peu de talent, c'est plus facile à dominer.

Une piste de solution, c'est de faire un don à ma fondation pour offrir une alternative à cet imposture culturelle. La société se prive de femmes de grand talent à cause de cette discrimination. Discrimination qui est aussi dommageable parce qu'elle entretient l'obsession de la minceur.

Commentaire fait par José Breton

Complément d'information :

L'histoire

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Karina était venue pour chanter...

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Karina Gauvin

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