Chapitre 11
Les exercices en solo

Objectif général
Améliorer sa capacité de s'abandonner à ses propres émotions.

Introduction
On peut s'abandonner à l'affection seulement si on est à l'aise avec son émotivité. En ce sens, les exercices en solo proposés dans ce chapitre ont pour but d'améliorer notre sensibilité. Mais avant toute chose, il faut savoir entrer en contact avec ses émotions. Comme l'abandon constitue une habileté qui se développe, personne n'est au même niveau: on a tous plus ou moins besoin de faire un effort pour progresser dans ce domaine.

Les six exercices suivants sont subdivisés en trois sous-objectifs de manière à faciliter l'atteinte de l'objectif général. Ces sous-objectifs correspondent à trois principes de base à respecter pour se rendre disponible à un échange d'affection. Ainsi, il faut reconnaître nos émotions, apprendre à s'y abandonner et choisir celles relatives à l'affection.

1e
Sous-objectif

Entrer en contact avec ses émotions

Déroulement commun:
Se coucher sur un lit dans l'obscurité et le silence complet, mais ne pas s'envelopper de couvertures. Garder les yeux fermés et changer de position au besoin, que ce soit sur le dos, sur le côté ou sur le ventre. Ces exercices doivent être pratiqués durant sept jours consécutifs, l'un à la suite de l'autre. Ce sont des étapes préparatoires à l'atteinte du second sous-objectif.

1.1 LA PAUSE

Objectif spécifique:
Apprendre à faire un temps d'arrêt.

Consigne:
Faire une pause d'une heure dans la journée, uniquement pour laisser libre cours à sa pensée.

Commentaire:
Avec toutes nos préoccupations et nos responsabilités, on finit par oublier de s'occuper de soi. Ainsi, on ne s'arrête jamais: on passe constamment d'une activité à une autre et dans notre tête, on est toujours en train d'essayer de résoudre un de nos nombreux problèmes. Il importe de s'accorder du temps pour prendre contact avec ses émotions et à ce qui se passe à l'intérieur. Dans les premiers jours, il sera difficile de tenir une heure car on aura le sentiment de perdre du temps. Il nous viendra l'idée de faire quelque chose au bout de quinze minutes: en faisant des efforts pour ne pas se lever du lit, on pourra tranquillement faire baisser notre tension. Au bout du septième jour, on ne devrait plus ressentir d'anxiété face aux choses que l'on doit faire. L'un des objectifs de cet exercice est de prendre plaisir à ne rien faire afin d'oublier ses préoccupations. Prendre du temps pour s'écouter vivre durant un moment d'inactivité physique et intellectuelle permet de prendre contact avec son émotivité afin de ressentir le besoin d'affection.

Après les sept jours que dure cet exercice, il nous faut continuer à prendre des pauses régulièrement afin de demeurer disposé à un échange d'affection. On peut effectuer des temps d'arrêt à travers d'autres activités dont la fréquence et la durée peuvent varier tel que: la marche, le jogging, le vélo, les voyages en auto ou en autobus, et dans toute autre activité où l'on se retrouve seul et dans l'incapacité de vaquer à nos occupations habituelles.

1.2 LE VIDE

Objectif spécifique:
Réussir à faire le vide dans ses pensées.

Déroulement:
La durée de cet exercice est de vingt minutes.

Consigne:
Comme ces exercices correspondent à des étapes, il faut refaire l'exercice précédent durant les cinq premières minutes par souci de continuité. Par la suite, il s'agit de se concentrer sur sa respiration et sur le mouvement de son ventre afin de penser le moins possible. Ainsi, lorsqu'une pensée survient, on ne s'y attarde pas: on la laisse défiler librement dans son esprit.

Commentaire:
Cet exercice permettra d'enlever une façade servant à préserver son estime de soi. En effet, la pensée permet d'assumer ses interactions avec les autres afin d'accepter ou de refuser leurs commentaires, par exemple. Elle nous protège de notre émotivité ou elle crée une distance avec nos émotions. Ainsi, si une personne nous dit une parole choquante, notre pensée intervient pour contenir notre émotion de colère. Une façade sert à se geler émotivement: en s'efforçant d'arrêter de penser, on peut plus facilement vivre ses émotions.

1.3 LE SONAR

Objectif spécifique:
Ressentir ses émotions.

Déroulement:
Cet exercice est d'une durée de vingt-cinq minutes.

Consigne:
Il faut consacrer cinq minutes à refaire chacun des deux premiers exercices pour la raison cité précédemment. Tout en continuant à se concentrer sur sa respiration afin d'éviter de penser, il faut se centrer sur son rythme cardiaque afin de sentir le corps vibrer.

Commentaire:
Cet exercice permet d'appendre à se centrer sur son ressenti intérieur. Nous avons tous beaucoup d'émotions qui nous habitent en tout temps et qui nous font vibrer. Il faut donc, durant quinze minutes, faire un effort pour prendre conscience à quel point notre corps vibre émotionnellement. C'est à partir de cette sensation que l'on entre en contact avec nos émotions. Durant cet exercice, il importe donc d'éviter d'analyser nos émotions: il faut simplement être à l'écoute de son corps pour prendre conscience de notre niveau de souffrance ou de bien-être.

2e
Sous-objectif

S'abandonner à ses émotions

2.1 L'ABANDON

Déroulement:
Se rapporter au déroulement commun du premier sous-objectif. Cet exercice dure trente minutes.

Consigne:
Il faut prendre cinq minutes pour répéter chacun des trois exercices précédents. Par la suite, se centrer sur son état de souffrance ou de bien-être.

Commentaire:
Il s'agit en premier lieu de détecter le signe indiquant que l'on est en train de retenir nos émotions. Celui-ci se caractérise par la sensation d'un poing ou d'une pression au niveau du sternum, avec une respiration saccadée. En effet, on ressent particulièrement celle-ci lorsqu'on se retient de pleurer. L'expression "avoir des boules dans la gorge ", employée lorsqu'on est triste, image bien cette retenue émotionnelle. En règle générale, on refoule beaucoup nos émotions soit pour les cacher aux personnes qui nous entourent ou parce que l'on se sent mal à l'aise avec celles-ci. D'après cette constatation, on peut définir une façade comme étant un refoulement d'émotions.

Le but de cet exercice est de retirer nos façades, dont on ignore souvent la présence d'ailleurs, et qui bloquent l'expression de nos émotions. Ainsi, en se concentrant sur la sensation liée à la pression au niveau du sternum, notre blocage émotionnel s'estompera graduellement. Par conséquent, si une émotion de tristesse nous habite, il se peut que l'on pleure spontanément: cela constituera alors la preuve que l'on s'est abandonné. Plus on retient l'expression d'une émotion longtemps, plus la pression au sternum sera grande. Dans cette situation, la libération de cette charge émotive accumulée se caractérisera par un dérapage émotif. Par exemple, dans le cas de la tristesse, on va commencer à pleurer et perdre ainsi la capacité de se retenir pendant plusieurs minutes. Il importe donc de pleurer car cela nous libère d'un grand stress.

Si, durant cet exercice d'abandon, on est en contact avec une émotion de joie, on éclatera de rire; s'il s'agit d'une émotion d'ennui, on deviendra mélancolique; si la frustration s'empare de nous, on criera. Et ainsi de suite pour chaque émotion que l'on refoule. Se libérer de celles-ci contribue au maintien de notre équilibre psychologique.

Il faut avoir atteint le premier sous-objectif pour réussir à s'abandonner à ses émotions. Les trois premiers exercices sont des étapes que l'on fait inconsciemment lorsqu'on s'abandonne. Ils favorisent donc l'apparition d'automatismes, dont celui du comportement affectueux. Celui-ci est une habileté émotionnelle qui se développe malgré son aspect spontané. Ainsi, avec le temps et l'expérience, on pourra s'abandonner à volonté, en tout temps et en toute circonstance.

Il importe de libérer les émotions refoulées afin d'être bien disposé à un échange d'affection. Ainsi, si une émotion de frustration nous habite lorsqu'on est sur le point de s'abandonner à notre partenaire, c'est la rage qui va ressortir et non pas notre douceur ou notre tendresse.

Il faut savoir s'abandonner émotivement à soi-même pour ensuite le faire à l'intérieur d'une relation amoureuse. L'abandon à soi-même, c'est se laisser vivre ses émotions librement et s'abandonner à l'autre, c'est lui permettre de prendre conscience de nos émotions. En d'autres mots, on se laisse aller aux émotions que notre partenaire nous fait vivre tout en exprimant les nôtres.

3e
Sous-objectif

Faire le ménage dans ses émotions

3.1 DÉFOULEMENT

Objectif spécifique:
Se libérer de ses émotions de mal-être et de bien-être.

Déroulement:
Cet exercice doit se pratiquer au besoin.

Consigne:
Choisir des activités permettant de se défouler.

Commentaire:
Se défouler constitue une hygiène psychologique qu'on se doit de faire régulièrement. En effet, le refoulement d'émotions nous fait souffrir et par conséquent, nous empêche de s'abandonner à l'affection. Comme je l'expliquais précédemment, il suffit de s'abandonner aux émotions qui nous habitent pour se libérer émotivement. Il faut donc en premier lieu être continuellement en contact ou présent à ses états émotifs. Par exemple, si on se sent triste, il faut se réserver du temps pour pratiquer une activité susceptible de nous faire pleurer telle que l'écoute de musique romantique, le visionnement d'un film d'amour dramatique ou la prise d'alcool pour se soûler. Puisque l'alcool est un inhibiteur, il peut nous aider à laisser tomber nos façades, facilitant ainsi l'expression de nos émotions.

Dans le même ordre d'idée: si on a accumulé de la colère, on doit se défouler soit en criant, en bûchant du bois ou en se défonçant dans un sport. En effet, l'activité physique est un excellent exutoire de l'agressivité, et tout particulièrement dans un sport de contact comme le hockey. Si on vit du découragement, il faut s'abandonner à la déprime: on ne doit rien faire et dormir le plus longtemps possible. D'ailleurs, toute lutte contre ses états émotifs est une forme de refoulement et le fait de refouler une émotion sur une longue période de temps rendra la situation chronique.

On peut aussi s'empêcher de vivre des émotions positives si on a une faible estime de soi. En effet, dans une telle situation, on a de la difficulté à vivre les émotions de joie parce qu'on craint les jugements des autres. Comme personne n'a une estime de soi parfaite, on doit faire des efforts, lorsqu'on se sent joyeux, afin de le laisser paraître aux autres en souriant et en blaguant. Exprimer notre joie aux autres constitue une façon de s'abandonner à nos émotions. On ne doit surtout pas se retenir, quand l'occasion se présente, pour laisser aller notre fou. En général, on se défoule de ses émotions de bien-être à l'aide des gens qui nous entourent, et de ses émotions de mal-être en solitaire pour ne pas faire de tort aux autres.

L'affection correspond à un défoulement d'émotions de bien-être uniquement. Tout se fait dans le moment présent: les émotions que l'on exprime sont celles qui se vivent au cours de l'échange d'affection et non celles vécues dans une situation passée. Ainsi, par le contact physique, notre partenaire nous fait vivre des émotions de joie et de bien-être que l'on refoule durant quelques secondes tout au plus, pour ensuite les exprimer à celle-ci qui fera de même envers nous, et ainsi de suite. Les émotions de l'affection sont si intenses qu'elles nous feraient souffrir si on les refoulait plus longtemps. Par conséquent, les émotions d'euphorie que l'on vit nous poussent à s'exprimer émotionnellement pour que l'on puisse continuer à se sentir bien. En fait, l'affection est une activité purement égoïste: il s'agit plutôt d'échange que de partage de bonnes émotions, au profit de chacun de nos corps respectifs. En se laissant aller aux bonnes émotions que l'on ressent pour sa partenaire, on devient spontanément tendre et doux; on aime la serrer dans ses bras et la caresser; on lui dit qu'on l'aime et qu'elle est belle.

La gestion des émotions passe donc par la libération des émotions de mal-être et de bien-être que l'on refoule, cela afin d'abaisser notre niveau de souffrance. En effet, il faut apprendre à extérioriser autant ses émotions de mal-être que de bien-être, afin de se placer dans un état d'esprit favorable à un échange d'affection.

3.2 LA VISUALISATION

Objectif spécifique:
Faire surgir des émotions à volonté.

Déroulement:
Se rapporter au déroulement commun du premier sous-objectif. La duré de l'exercice est de trente minutes.

Consigne:
Il faut imaginer une situation à partir des thèmes relatifs à l'émergence d'émotions spécifiques à l'affection. On doit choisir un ou plusieurs des thèmes proposés pendant les sept jours que dure cet exercice. Pour chaque émotion qui surgira, il faut s'y abandonner et en explorer les effets sur son corps et sur ses états d'esprit. Cet exercice consiste en une forme d'auto-hypnose qui se réalise à partir de suggestions.

Les thèmes:

La fragilité:
Je vois ma partenaire comme étant fragile physiquement: je lui fais attention, je la serre dans mes bras avec délicatesse.

La vulnérabilité:
Je vois ma partenaire comme vulnérable psychologiquement: je me préoccupe beaucoup d'elle en étant gentil, en l'écoutant et en ayant une présence agréable.

L'innocence:
Je vois ma partenaire comme pure d'esprit: j'évite de la critiquer et de la juger, je fais des efforts pour la comprendre.

L'importance:
Je vois ma partenaire comme importante pour moi: j'en prend soin, je lui accorde beaucoup d'attention, je donne de mon temps sans compter.

Le merveilleux:
Je m'émerveille en contemplant les gestes, les pensées, la beauté, la présence et la douceur de ma partenaire.

La sensualité:
Je vois ma partenaire avec un corps sensuel: je deviens doux en contact avec la douceur de sa peau et tendre en contact avec ses rondeurs.

L'euphorie:
Je vois ma partenaire comme source d'euphorie: j'ai le sentiment de l'aimer éperdument.

La beauté:
Je vois ma partenaire comme la plus belle femme au monde: j'ai le sentiment d'être privilégié, je me sens heureux.

La douceur:
Je vois ma partenaire douce de corps et d'esprit: je me sens en sécurité, elle m'apaise.

L'odeur:
Je vois ma partenaire dégageant un parfum naturel tellement agréable, qu'il m'en fait perdre le fil de mes idées: je tombe en extase.

Le bon:
Je vois ma partenaire comme étant un dessert riche et crémeux: je la dévore tellement elle est bonne.

L'intimité:
Je vois ma partenaire comme précieuse: je suis respectueux, j'entre en communication avec elle en toute humilité, je me fais tout petit devant elle.

Commentaire

La visualisation peut se comparer à un rêve éveillé, mais elle diffère par son aspect concret. En effet, une rêverie concerne habituellement le désir d'une chose inaccessible ou qui arrivera dans un futur éloigné. Par exemple, on peut rêver à ce que l'on ferait si on gagnait à la loterie. Mais avec la visualisation, on utilise son imagination pour recréer dans sa tête une situation déjà vécue ou pour en créer une par déduction logique à partir de nos connaissances théoriques.

La nuit, dans nos rêves, nous avons des sensations d'environnement physique en réalité virtuelle: tout nous semble réel, on entend des sons, on goûte des aliments, on voit des choses, on touche des objets et on détecte des odeurs. Cela s'explique par le fait que notre cerveau utilise les informations emmagasinées en mémoire pour créer des situations de vie virtuelle. Quant aux émotions que l'on vit dans nos rêves, elles sont parfaitement réelles: par exemple, si l'on rêve que l'on fait un accident de vélo, on va subitement se réveiller en sueur et avec un rythme cardiaque élevé comme si cela s'était vraiment passé.

CONCLUSION

Pour avoir un échange d'affection, il est essentiel de maîtriser son monde intérieur. En effet, plus on expérimente son vécu émotionnel, plus on apprend à le connaître et moins on a peur de ses émotions. En fait, maîtriser ses émotions signifie d'être capable de les identifier et de savoir vers où elles nous mèneront. Ainsi, en sachant que l'affection nous mène vers un grand bien-être, on peut décider de s'y abandonner.

Les exercices proposés dans ce chapitre favorisent l'apprivoisement de la souffrance. D'ailleurs, on ressent le besoin d'affection pour soulager une souffrance qui provient d'un sentiment d'insécurité. Les personnes qui fuient leurs émotions sont moins capable de faire face à la souffrance. Par conséquent, il est impossible de se laisser aller à l'affection si on a peur de l'effet de nos émotions.

Lorsque l'on est à l'aise avec ses émotions, on peut s'amuser avec celles-ci. En effet, il importe de prendre du plaisir à s'intérioriser afin de faire jaillir des émotions à volonté, à l'aide de la visualisation. Cette habileté émotionnelle, permet d'accueillir plus facilement sa partenaire dans son coeur dans le but de réaliser un échange d'affection. Celui-ci constitue un jeu où les deux personnes s'amusent à se faire vivre des émotions de bien-être.

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